Quel rapport entre personnalité et performance au travail ?

La personnalité du candidat joue un rôle clé dans le recrutement. Attention, cependant, à ne pas tirer de conclusions hâtives sur les liens entre personnalité et performance au travail !

Qu’est-ce que la personnalité ?

La notion de personnalité est complexe et potentiellement problématique. C’est à la fois une idée floue qu’on peut se faire de quelqu’un mais aussi une manière de catégoriser une personne, parfois de manière définitive.

La psychologie a pour objet (entre autres) l’étude des comportements des individus et elle essaie pour cela de dresser des modèles qui permettent de différencier des grands types de comportement, notamment en expliquant que les individus possèdent des traits de personnalités différents.

Un modèle souvent utilisé est par exemple celui des BIG FIVE, qui correspond à cinq grands traits de personnalités qui peuvent s’exprimer plus ou moins chez les individus. Ces cinq traits sont : l’ouverture à l’expérience, la consciensciosité (parfois renommé en conscience professionnelle), l’extraversion, l’agréabilité et le névrotisme.

Quelqu’un qui a un fort niveau de consciensciosité par exemple, se caractérise par une forte capacité de travail et une bonne fiabilité dans l’exécution de ses tâches. Ces comportements sont donc importants dans le milieu professionnel.

La personnalité et la « performance »

Le modèle BIG FIVE a été longuement étudié, et il a par exemple été démontré, toute chose étant égale par ailleurs, que :

  • Les personnes avec un haut degré de consciensciosité avaient des bons niveaux de performance dans leur travail sur à peu près tous les types de métiers (Barrick and Mount, 1991 ; Salgado, 1997)
  • L’habileté mentale est associée à des bons niveaux de performance dans les métiers complexes (Schmidt and Hunter 1998) ;
  • L’extraversion est un bon prédicteur de la performance dans les métiers demandant beaucoup d’interactions (Mount, Barrick, & Stewart, 1998), notamment les métiers de la vente (Barrick and Mount 1991)
  • Enfin, le névrosisme est négativement corrélé avec la réussite professionnelle (les personnes facilement anxieuses ou stressées auront de moins bonnes performances) ;

Les limites de l’étude de la personnalité

Ceci étant dit, nous voudrions sortir d’un écueil assez classique dans l’utilisation de ce genre de données : il ne s’agit pas ici de dire que les personnes qui possèdent telle caractéristique sont plus performantes ou plus intelligentes. Il s’agit d’une interprétation en considérant que tout autre facteur est par ailleurs égal — ce qui n’arrive jamais dans la réalité.

En effet, les tests de personnalités sont effectués de manière empiriques, souvent à partir de questionnaires où l’individu doit s’auto-évaluer, avec tous les biais et les imprécisions que cela peut amener. Bien sûr, les chercheurs essaient au maximum de neutraliser les effets négatifs des questionnaires (par exemple en posant plusieurs fois des questions similaires sur un même sujet et en vérifiant que l’ensemble des réponses est cohérente), mais le problème principal est que les questions sont généralement posées dans l’absolu.

Voici par exemple une question posée par un outil d’évaluation de la personnalité :

Comment va-t-on répondre à cette question ? Est-ce que la réponse ne dépendrait pas de ce qui se cache derrière cette énigmatique « situation » ? En fonction de la situation qu’on imagine, et de ce qu’on considère comme quelque chose de stressant, la réponse sera différente.

Dans la réalité, en effet, les gens sont baignés dans un contexte précis qui influence leur comportement. Un autre exemple : quelqu’un peut avoir un faible score de consciensciosité en général mais être très motivé par un travail spécifique et donc particulièrement attentif à ce qu’il fait, donc son trait de « personnalité » aura assez peu de conséquence dans son travail (il sera compensé par autre chose). A l’inverse, quelqu’un qui a un fort score de consciensiosité pourra tout à faire être démotivé dans son travail à cause d’un facteur extérieur (exemple : une injustice salariale).

Par ailleurs, la notion même de performance peut elle aussi être largement soumise à discussion. Non seulement elle est sujette à une forte variabilité d’un évaluateur à l’autre (Viswesvaran et al., 1996), mais elle dépend fortement du choix de l’indicateur de performance, qui n’est peut être pas représentatif de la complexité d’une organisation (un exemple typique et un peu stéréotypé : un salarié peu « performant » mais qui sait mettre une bonne ambiance sera mal évalué sur sa performance, mais son licenciement aurait un impact négatif sur la motivation de ses collègues, et donc sur la performance globale de l’entreprise).

Enfin, il faut aussi bien comprendre que ce type de modèle psychologique est conçu par une culture (américaine en l’occurrence) et s’adapte parfois mal à d’autres cultures — le modèle des BIG FIVE par exemple, éprouve des difficultés à identifier le critère d’agréabilité chez les Hongrois. Une autre étude a montré que chez les Chimanes, une tribu de chasseurs-cueilleurs d’Amérique du Sud, seuls 2 traits parmi les 5 étaient exprimés — cela s’expliquerait, selon l’auteur de l’étude, car ces deux traits suffiraient pour réussir dans leur environnement. Ce n’est donc pas une capacité proprement humaine qui est étudiée, mais une capacité dans un contexte culturel spécifique.

Pourquoi étudier la personnalité malgré ces limites ?

Cependant, malgré ces faiblesses qu’il est utile et important de rappeler, ces modèles psychologiques sont tout de même utiles pour nous aider à comprendre la relation qui peut exister entre la personnalité d’un candidat telle qu’elle est comprise de manière forcément imparfaite par la psychologie et les décisions du recruteur.

En effet, nous ne cherchons pas ici à savoir précisément quel sera le comportement réel de l’individu dans son contexte futur, mais de comprendre comment l’interprétation d’un recruteur influencera sa décision (peu importe finalement le comportement de la personne recrutée au sein de son poste).

Pour en savoir plus, vous pouvez lire notre série « Les soft skills et le CV » :

Série « Les soft skills et le CV »


Bibliographie

Barrick, Murray R., et Michael K. Mount. « The Big Five Personality Dimensions and Job Performance: A Meta-Analysis ». Personnel Psychology 44, no 1 (1991): 1‑26. https://doi.org/10.1111/j.1744-6570.1991.tb00688.x.

Mount, Michael K., Murray R. Barrick, et Greg L. Stewart. « Five-Factor Model of personality and performance in jobs involving interpersonal interactions ». Human Performance 11, no 2‑3 (1998): 145‑65. https://doi.org/10.1207/s15327043hup1102&3_3.

Rothmann, S., et E. P. Coetzer. « The Big Five Personality Dimensions and Job Performance ». SA Journal of Industrial Psychology 29, no 1 (24 octobre 2003). https://doi.org/10.4102/sajip.v29i1.88.

Salgado, Jesús F. « The five factor model of personality and job performance in the European Community ». Journal of Applied Psychology 82, no 1 (1997): 30‑43. https://doi.org/10.1037/0021-9010.82.1.30. Schmidt, Frank L, et John E Hunter. « The Validity and Utility of Selection Methods in Personnel Psychology: Practical and Theoretical Implications of 85 Years of Research Findings », s. d., 13.

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