Télétravail et horaires flexibles : les origines
Notre volonté de passer au télétravail est partie de l’idée que l’entreprise ne devait pas être une source de contraintes inutiles pour l’individu. A partir de là, travaillant tous derrière un écran, il était évident que le lieu de travail centralisé était plutôt absurde. Quant aux différentes peurs afférentes à l’abandon du lieu de travail (perte de sociabilité, de productivité, de capacités d’innovation), en bonne organisation adoptant certains principes de l’holacratie (voir cet article), nous avions bon espoir de les résoudre au fur et à mesure.
Le principe des horaires flexibles est venu au même moment, toujours sur cette idée que l’organisation n’avait aucune bonne raison de contraindre les horaires de travail, même si pour la plupart d’entre nous il s’agissait d’horaires classiques. D’ailleurs, comme nous l’expliquons dans notre article Déconstruction du (télé)travail, l’idée même d’échanger son temps de travail contre une rémunération est extrêmement récente dans l’histoire humaine et ne correspond pas aux cycles naturels du travail :
Nous voilà donc aujourd’hui, au XXIème siècle, avec cet héritage douteux [issu de l’esclavage et de l’exploitation ouvrière], cette idée parfaitement acceptée que notre travail s’échange contre du temps, en contradiction avec la pratique cyclique d’efforts et de récupération qui semble revenir au naturel dès qu’on supprime la contrainte temporelle.
— Déconstruction du (télé)travail
Sans aller jusqu’à déconstruire totalement cette logique dans notre fonctionnement, nous essayons cependant de faire en sorte que chacun puisse s’organiser comme bon lui semble — que ce soit sur des horaires fixes ou au contraire assez déstructurés, que ce soit près de nos bureaux ou à plusieurs centaines (voire milliers) des kilomètres, il nous semble en effet important que chacun puisse s’y retrouver, ce qui semble plutôt bien fonctionner.
Comme l’explique Aude, en effet : “Les horaires flexibles me permettent d’être à 100% dans mon travail, avec une meilleure productivité et moins de stress par rapport aux autres boîtes où tu as besoin de caler tes RDV à la pause déjeuner”. Pour Julien, “je sais que je peux parfois m’absenter 1h ou 2, et que les autres font la même chose”. Pour d’autres encore, une petite sieste assumée en cours de journée fait partie des grands bénéfices des horaires flexibles : “Quand tu es cramé parce que tu n’a pas dormi, autant se reposer !”.
Est-ce que cela pose de problème d’organisation et de coordination ? Pas vraiment, Aude constate que “tout le monde est toujours dispo”. Pour Julien, même si quelqu’un est parfois absent quand il en a besoin, il y a toujours moyen de rattraper plus tard, donc ce n’est pas perçu comme un problème.
Télétravail : petits et grands mouvements
Il est intéressant de constater comment la politique de télétravail s’est diffusée au sein de l’organisation, et les différents mouvements auquel elle a donné lieu.
A partir du moment où nous avons mis en place ces principes en 2015, certains d’entre nous ont commencé à rester travailler de chez eux un ou deux jours pour changer un peu de rythme, trouver de la concentration ou rester à leur domicile en cas de besoin (travaux, livraisons, problème de garde d’enfants, grèves de transport, etc.).
Assez rapidement, cependant, certains ont déménagé à 50km du bureau pour profiter d’un autre cadre de vie, et ne venaient plus qu’un ou deux jours par semaine au bureau. Il y a eu aussi quelques expérimentations à l’étranger pour 3 à 6 mois (voir Le petit guide du travailleur-voyageur ou Déconstruction du (télé)travail). Une salariée est partie explorer la Méditerranée en bateau (tout en travaillant !), et François s’est installé à 200km de notre base nantaise car sa femme avait repris une ferme là-bas.
Ces différents mouvements montrent bien que chacun s’est senti libre d’explorer ses envies, et que l’organisation n’était pas un frein pour cela : elle était totalement agnostique sur le lieu de vie des uns et des autres.
En revanche, soyons honnêtes, il y avait deux groupes parmi nous : ceux qui avaient tendance à préférer l’isolation, et ceux qui aimaient la présence de leurs collègues et l’effervescence et la camaraderie qui lui était associée. Pour ces derniers, notre petite taille ne nous permettait pas de maintenir un seuil de présence suffisant tous les jours, et il arrivait que certains se retrouvent à deux, voire seuls, au bureau. Déprime assurée !
Pour répondre à ce problème, nous avons essayé pendant un moment de nous regrouper certains jours plus que d’autres — ceux qui étaient à distance s’organisaient pour revenir les mêmes jours de la semaine, et nous pouvions profiter de deux ou trois jours de présence renforcée au bureau. Cela n’était pas parfait mais nous permettait de profiter les uns des autres… Par contre, tout ça a changé en 2020, avec le confinement 😱.
Du confinement à l’abandon de nos bureaux
Comme pour beaucoup d’organisations, le confinement a été l’occasion de tester notre capacité d’adaptation à quelque chose de totalement nouveau. Chez DoYouBuzz, chacun savait que l’organisation s’adapterait aux conditions de vie des uns et des autres, aussi le confinement (et la garde d’enfants, surtout !) n’était finalement qu’une extension extrême de ce principe. Chacun a donc fait du mieux qu’il pouvait en fonction de sa situation personnelle et de ses possibilités : certains travaillaient quasiment comme avant, tandis que d’autres avaient des rythmes de travail plus faibles ou hachés du fait de leurs contraintes personnelles.
Petit à petit, cependant, tout le monde s’est habitué au télétravail total et a considéré que c’était une modalité de travail pertinente. Fin 2020, nos bureaux physiques nous semblaient être devenus une charge financière et mentale inutile. Devant l’incertitude et grâce aux apprentissages de ces derniers mois, nous avons préféré résilier notre bail, et nous libérer définitivement de nos bureaux. Cette décision a donné lieu à plusieurs discussions (voir Des décisions stratégiques partagées), mais l’évidence a fini par s’imposer à nous.
Nous serons cependant vigilant à ce que l’abandon des bureaux ne soit pas aussi un abandon des liens entre collègues — ce serait probablement une erreur fatale pour l’organisation !
Nous avons donc pour le moment prévu de maintenir deux types de rencontres : 1/ des rencontres régulières (une fois par semaine au moins pour ceux qui le peuvent et le veulent, dans des lieux de coworking ou ailleurs, une fois par mois pour ceux qui ne peuvent pas faire le déplacement chaque semaine) et 2/ des temps forts une à deux fois par an afin de passer vraiment du temps ensemble, d’avoir des longues conversations sur tout et sur rien, pour construire des nouveaux liens et resserrer les existants.
Nous verrons bien ce que ça donne, et si cela ne convient pas, nous savons que nous aurons l’occasion d’en discuter et de trouver de nouvelles solutions !